Généalogiste amateur
Je participe depuis sept mois sur Twitter à la commémoration d’un ancêtre du jour. À la date anniversaire du jour de sa naissance, de son mariage ou de sa mort, on rédige succinctement un petit tweet augmenté d’un hashtag #1J1Ancêtre (1 jour 1 ancêtre) ou #1J1Collateral (1 jour 1 collatéral) pour les frères, oncles, neveux et cousins d’un ancêtre.
Chacun ensuite peut illustrer son tweet par une photo de l’ancêtre en question ou par l’image de l’acte, d’un arbre généalogique, d’une carte postale du lieu, ou bien encore d’un plan de situation. Parce que ne nous voilons pas la face, la lecture de ces tweets est aussi enthousiasmante que celle d’un arbre généalogique sur 12 générations qui ne soit pas le notre. #LOL
Ceci dit, je lis tous les #1J1Ancêtre car on peut tomber sur un ancêtre commun et rencontrer un cousin en ligne, découvrir un ancien métier, un prénom chelou, des lieux inconnus et parfois on y lit des anecdotes cocasses, insolites, rigolotes, macabres, funestes, etc.
Pour ne pas ennuyer la poignée de fidèles qui suivent le #1J1Ancêtre, j’essaye d’humaniser le plus possible mon tweet en remplaçant par exemple une date de mariage par l’âge des mariés, la mention de deux frères par leurs prénoms, etc.
Exemple type Cerfa :
Il y a 192 ans, le 24/8/1827 à Bretteville-sur-Odon (14) décédait Frédéric Jules #HAMELET fils d’Exupère #HAMELET et de Jeanne Marie #CAILLOUET. Il était né le 2/1/1771 et s’était marié le 16/11/1790 à Bretteville-sur-Odon avec Marie Catherine #REVEL. #Genealogie #1J1Ancetre
Même exemple en plus « humain » :
Il y a 192 ans, le 24 août 1827 à Bretteville-sur-Odon dans le Calvados, décédait Frédéric Jules #HAMELET meunier de 56 ans. Il laisse veuve Marie Catherine #REVEL marié avec à l’âge de 19 ans, elle en avait 21. #Genealogie #1J1Ancetre
Les ancêtres récents
Ça c’est pour les ancêtres « classiques » pour lesquels on découvre leurs histoires via les registres d’états civils (les NMD – Naissance-Mariage-Décès) ou paroissiaux (les BMS – Baptême-Mariage-Sépulture ) ou via les actes notariés, les relevés de cadastre et les recensements de population. La liste est loin d’être exhaustive. Certains sont en ligne d’autres sont consultables sur place aux archives.
Parfois aussi, on s’appuie sur le travail de transcription de spécialistes. Car à moins d’être diplômé en paléographie et être latiniste, il y a peu de chance de trouver par hasard l’acte de baptême d’un ancêtre qui aurait vécu avant 1700.
Dans tous les cas, on source ses données. Je m’y contrains aujourd’hui. Chose que je ne faisais pas lorsque je n’étais qu’un jeune Padawan généalogiste. Je notifiais juste le nom de la personne référente pour y revenir plus tard…
L’acte ci-dessous est celui du baptême de Maurice Cotty du 3 mars 1624 à Ploujean dans le Finistère. Il est écrit en latin, complètement inexploitable pour moi. Comme je suis adhérent au Centre généalogique du Finistère, je savais qu’il fallait chercher Mauritius et pas Maurice. J’ai donc pu identifier cet acte. J’ai fait confiance à ceux qui m’avaient précédé.
L’acte suivant est celui du mariage de Michel Farouault et de Mathurine Renoult daté du 15 juillet 1606. J’ai juste réussi à déchiffrer les noms mais pour le reste je ne sais pas. Pour trouver cet acte, je me suis appuyé sur les recherches fructueuses de généalogistes plus aguerris que moi. J’ai encore fait confiance.
Les ancêtres historiques
Et puis, il y a les ancêtres lointains qui appartiennent parfois à la grande Histoire. Les recherches généalogiques ne peuvent plus se faire via le parcours précédemment décrit. Il faut s’en référer aux travaux des historiens et autres chercheurs.
Il se trouve que deux familles originaires du Ponthieu (la Somme) de très ancienne noblesse se sont croisées sur mon arbre, déployant des branches nobles et royales qui remontent ainsi jusqu’à Charlemagne et Rollon, mes deux ancêtres favoris. Il s’agit des familles de #BIENCOURT et de #BELLOY.
Pour retrouver ses ancêtres historiques, je me suis appuyé sur des bases de données en ligne. La plus connue et la plus controversée est Wikipedia qui est constamment mise à jour pour le meilleur et pour le pire. Son seul défaut serait qu’elle n’existât point.
Pour les familles nobles, il y a la base Roglo. Elle aussi est mise à jour mais surtout les fiches des individus sont souvent commentées et sourcées. Et au grand jamais, je ne me suis appuyé sur ces immenses arbres de généalogie en ligne que l’on peut trouver sur Geneanet.
Bref, je recoupe les informations que je trouve sur les deux bases pour mettre à jour mon arbre. J’essaye dans la mesure de mes compétences de renseigner la vérité la plus vraisemblable. Par contre, je me coltine la saisie de toutes les dates antérieures à 1582 en calendrier Julien. Il me semble que je m’approche plus de la vérité en procédant de cette manière.
Comme nous avons à faire à des nobles, je recoupe encore les informations à l’aide des Nobiliaires et autres dictionnaires de la noblesse qui sont également consultables en ligne. Il n’est pas rare que je trouve trois dates différentes pour un même événement. Je saisis alors « vers année » au lieu d’une date « exacte ».
Et donc, aujourd’hui j’ai posté sur Twitter mes contributions au #1J1Ancetre. Thomas Ier de Savoie dit le Gibelin est mort ce jour là. Il était comte de Savoie, comte de Maurienne et un marquis d’Italie. En consultant sa fiche Wikipedia, je (re)découvre qu’il était tombé raide dingue amoureux de Béatrice de Genève. Je le note sur mon tweet fidèle à ma mission d’humaniser un peu ces tweets commémoratifs.
Las !
Un généalogiste plus chevronné que moi s’émeut que je puisse faire confiance aux bases grand-public. Mais surtout, il tique sur l’amour attribué aux protagonistes de cette histoire. Je me sens misérable et je regarde de plus près de quoi retourne cette embrouille.
Sur la fiche Wikipedia de Thomas, il est écrit que c’est à l’occasion d’une fête qu’il rencontre la fille du comte de Genève. C’est sourcé et on l’a vu, c’est important de mentionner les sources ! Et des souces sur sa fiche, il y en a pléthore !
Cité par Bertoni, I Trovalori d’Ilalia, Modène, 1915, p. 8. Texte extrait de : Charles-Albert Cingria, La fourmi rouge et autres textes, L’Âge d’Homme, , 221 p. (ISBN 978-2-82510-669-3, lire en ligne [archive]), p. 176.
Après je comprends qu’on puisse encore mettre en doute cette vérité, là. Sans doute existe t-il des ouvrages qui mentionnent une toute autre histoire. Mais là, on a à faire à des batailles de spécialistes. Je ne suis qu’un généalogiste amateur et ces querelles là ne me sont pas parvenues.
Mais en y réfléchissant bien, qui était témoin de la scène dans la chambre entre le père et le fils ? Fake news ? Difficile de statuer en effet.
Ceci dit, il est tout aussi difficile de prouver que cette scène n’a pas eu lieu. 😉
En tous les cas, je remercie mon contradicteur sur Twitter car j’ai vraiment cru avoir commis un crime. Et puis j’ai réfléchi un peu plus loin. Que savons nous du passé ? Que savons nous exactement de la vie intime de nos ancêtres, qu’ils soient nobles ou paysans ?
Quand on connaît la facilité de l’être humain à travers l’Histoire avec un « H » majuscule très précisément, pour manipuler, intriguer, calculer, mentir, trahir mais aussi d’aimer, de protéger, de sauver, bref de vivre, je doute très fort que nous détenions la vérité vraie.
Et pourquoi pas ?